Elles n’ont pas eu de chance ces élections. Traditionnellement peu mobilisatrices, portées par des têtes de listes qui en général ne sont pas des figures politiques nationales et qui donc sont souvent peu connues des électeurs, elles ont aussi été les victimes collatérales des attentats du 13 novembre. La campagne électorale a été suspendue et les paramètres nationaux, déjà fortement prégnants, sont devenus essentiels. Les bilans des équipes en place et les programmes des candidats sont à peu près passés inaperçus.
Il n’y a qu’un qui n’a pas à se plaindre : c’est le FN.
Depuis plusieurs mois, au gré des sondages qui le donnent vainqueurs dans telle ou telle région, ou surfant sur les crises diverses qui touchent l’Europe, le parti d’extrême-droite « fait le buzz », avec un art consommé de la manipulation des médias.
Bientôt, chose qui paraissait improbable il y a quelques semaines, la Normandie pourrait même être dirigée par le FN, au terme d’une triangulaire au second tour.
La CFDT n’est pas le godillot d’un parti et ne donne pas de consigne de vote
La CFDT est depuis toujours attachée à bien différencier les plans syndicaux et politiques. Et pas seulement dans les discours. Si bien évidemment des adhérents de la CFDT peuvent avoir des responsabilités politiques, et si inversement des responsables de la CFDT peuvent être adhérents d’un parti politique, car nous sommes des citoyens, il n’est pas permis à un responsable syndical de la CFDT d’être aussi un responsable politique. On ne peut pas être crédible dans les deux rôles à la fois. Et pas question non plus, comme la CGT en 2012, d’appeler à voter pour un candidat.
Cependant, la CFDT s’est toujours opposée à l’extrême-droite, à cause des valeurs que cette dernière véhicule : démagogie, rejet de l’autre, politique du bouc émissaire, remise en cause de l’égalité hommes-femmes … Il n’est ainsi pas possible d’être à la CFDT et se soutenir publiquement le FN.
Une « fenêtre de tir » favorable au FN
Le succès médiatique et « sondagier » aujourd’hui, (électoral demain ?) du FN est relativement facile à expliquer. La société française est gangrénée depuis 40 ans par le chômage. La crise de 2008 a dégradé fortement les choses, et pour l’instant l’économie française est au fond du trou. Dans le même temps, nombreux sont les politiques, les syndicats, les intellectuels et les commentateurs, qui pour certains n’ont rien à voir avec l’extrême-droite, qui dénoncent à l’avance toutes les politiques mises en place. La confiance dans l’action publique est au plus bas. S’ajoute à cela la tradition bien française du nombrilisme, qui fait dédaigner d’aller voir à l’étranger ce qui fonctionne ou pas.
La peur du lendemain, les solutions faciles, le bouc émissaire étranger, la façade de plus en plus « présentable » offerte par les dirigeants du parti, font que le FN attire de plus en plus les électeurs.
Un danger réel
Cependant, le plan médiatique de la dédiabolisation connaît de temps en temps quelques ratés qui éclairent la réalité des idées portées par les cadres du FN.
Ainsi, après avoir utilisé la laïcité comme paravent de l’islamophobie, on entend maintenant que pour être pleinement citoyen français, il faut être chrétien, et pas musulman ! Va-t-on expulser tous ceux qui ne sont pas de bons catholiques, comme l’a fait Louis XIV avec les protestants ?
De même, malgré les images de femmes modernes données par Marine Le Pen et sa nièce, les discours et les propositions du FN tracent du droit des femmes une vision pour le moins rétrograde. Les annonces sur la suppression du financement des plannings familiaux ne sont que la partie émergée de l’iceberg.
Bien plus loin que la dénonciation du « gauchisme soixante-huitard », on retrouve une mise en cause des fondements de la République, comme la laïcité et l’égalité. Le retour à une « France éternelle », aussi utopique aujourd’hui qu’impossible à trouver dans le passé.
Tous les paramètres sont favorables actuellement au FN. Cela ne durera pas. Quand la croissance économique reviendra, quand le chômage baissera, la situation politique changera. C’est maintenant qu’il faut faire barrage au FN en allant voter les 6 et 13 décembre prochain.