Le SGEN-CFDT Basse Normandie appelle les collègues à se mobiliser le 5 décembre contre les propositions actuelles de Réforme des retraites qui, en l’état, dégraderaient fortement le niveau des pensions de la plupart des enseignants.
Grève et Rassemblement
Jeudi 5 décembre
devant le Phénix, Université de Caen
10H30
Mais pourquoi une réforme des retraites ? Ou plutôt pourquoi maintenant ? la question se pose, car il n’y a actuellement aucune urgence puisque le système est quasiment à l’équilibre (entre les recettes liées aux cotisations et les dépenses relatives au versement des pensions), du fait de la dernière réforme en 2010 qui a entrainé une forte diminution du taux de remplacement *. En effet, l’allongement progressif du nombre de trimestres à valider pour bénéficier d’une retraite à taux plein conduit nombre de salariés à quitter leur emploi avant d’avoir atteint ce seuil (d’où l’application d’une décote et un taux moyen de remplacement en baisse).
En 2017, conformément à sa promesse de campagne, le président de la République avait chargé JP Delevoye de préparer des propositions. Celui-ci a remis son rapport le 18 juillet dernier ("Préconisations pour un système universel de retraites").
Mais pourquoi un "Système par points " ?
Notre système de retraite repose sur le principe de la répartition : on ne cotise pas pour abonder un compte qui sera disponible lors du départ en retraite (ce serait alors une retraite par capitalisation) , mais pour permettre le versement des pensions à ceux qui sont actuellement retraités.
Comment fonctionne le système actuel ?
- pour partir en retraite, il faut avoir atteint un age légal minimum : 62 ans (ou avant pour ceux qui ont commencé à travailler tôt _ entre 14 et 20 ans _ et qui ont déjà cotisé au moins 43 annuités)
- pour bénéficier d’une retraite à taux plein, il faut avoir cotisé 43 annuités. Seuls les trimestres complets sont comptabilisés : 43 annuités, c’est donc 172 trimestres. C’est particulièrement injuste pour ceux qui ont eu des carrières "accidentées".
- la cotisation mensuelle (cotisation d’assurance vieillesse) : représente _ 6,9 % du salaire brut pour le salarié (1,9 % pour l’employeur) dans le régime général _ 10.83 % du salaire brut pour les fonctionnaires en 2019 (74 % pour l’employeur). Le montant de la cotisation augmente chaque année au 1er janvier, ce qui explique par ailleurs une baisse annuelle du salaire net …
- la pension mensuelle est versée par la caisse de retraite de l’ex-salarié. S’il a cotisé à des caisses différentes (après avoir été salarié dans différents secteurs), il reçoit plusieurs pensions (on dit qu’il est "polypensionné"). Les trimestres incomplets ne sont pas validés.
Avec un système à points, les polypensionnés auraient moins de difficultés à constituer leur dossier : les points acquis dans les différents emplois se cumulent. Les polypensionnés, de plus en plus nombreux y compris dans la fonction publique, seraient avantagés. Par ailleurs, à tout moment de sa carrière, le salarié connaitrait le nombre de points qu’il a accumulés et pourrait calculer la pension à laquelle il a droit s’il décide de partir en retraite. NB : le système par points tel qu’il est envisagé s’inscrit dans le cadre d’une retraite par répartition : les actifs continuent de financer les pensions des retraités, ce n’est en aucun cas une capitalisation.
Pour ces raisons, la CFDT est à priori favorable à l’instauration d’un système par points.
En revanche, les conditions de départ en retraite peuvent être radicalement différentes. En effet, contrairement à ce que nous connaissons actuellement, ce système ne donne pas droit à un pourcentage du salaire perçu durant l’activité (qu’il s’agisse des 25 meilleures années ou des 6 derniers mois), mais à une pension calculée sur la base du nombre de points acquis ainsi que la valeur du point à ce moment.
Il apparait donc qu’avec un tel système, les conditions dans lesquelles la valeur du point va être fixée sont essentielles ! Or, le rapport Delevoye préconise que celle-ci soit revue tous les 5 ans, dans un cadre budgétaire intégré au projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) fixé par le gouvernement et le parlement (et donc par le gouvernement, compte-tenu du fonctionnement des institutions de la Vème République, où l’Exécutif est principalement à l’initiative des propositions de lois…). C’est donc dans les faits au Ministère des Finances que reviendrait la charge de déterminer la valeur de ce point !
Autre élément, particulièrement défavorable pour les fonctionnaires et en particulier pour les enseignants : avec un tel système, la carrière se trouve "lissée". En effet, l’accumulation de points se faisant tout au long de la carrière, c’est donc l’ensemble de celle-ci qui est pris en compte pour le calcul du montant de la pension. Or, les fonctionnaires (et en particulier les catégories A) voient leurs salaires véritablement progresser en fin de carrière avec la Hors-Classe (désormais accessible à tous du fait de l’allongement progressif de la carrière et de la réforme PPCR qui augmente également le ratio d’enseignants admis chaque année à la Hors-Classe). Il faut ajouter que le salaire moyen des enseignants a très nettement régressé en comparaison avec celui d’autres cadres depuis 1982 (- 20 % pour les certifiés, – 8 % pour les professeurs des écoles _ qui ont connu une revalorisation avec la création du corps des PE en 1989).
Pour la CFDT, un système par points peut être une avancée, à condition :
- que les partenaires sociaux (représentants des salariés et des employeurs) aient un rôle incontournable dans la définition de la valeur du point. (NB : c’est ainsi que sont gérées actuellement les retraites complémentaires, système de cotisation par points)
- que la grille de salaires des enseignants soit totalement revue : il est hors de question que ceux-ci soient les perdants d’une telle réforme !
- que la transition entre le système actuel et le futur ne laisse personne au bord de la route !
La CFDT porte ces revendications et discute avec l’Exécutif pour les faire valoir. Le Ministre a envoyé un courrier aux syndicats de l’Education Nationale le 12 novembre dans lequel il dit vouloir s’engager dans une réforme salariale. Mais ce courrier demeure assez flou et surtout, sous-entend qu’une telle évolution serait liée à une négociation sur les missions des enseignants ! (“Cette discussion devra prendre place dans le cadre d’une approche plus globale permettant de définir ce que sera le métier d’enseignant au 21ème siècle ”)
La réforme ne doit pas être un moyen de faire des économies, ni d’en demander encore plus à nos collègues qui sont au bord du burn-out, mais l’occasion de créer un système de retraite plus lisible et plus juste !
décote : c’est un coefficient de minoration des droits de la pension de retraite de base. Elle s’applique lorsque l’assuré ne dispose pas du nombre de trimestres suffisants pour obtenir sa retraite à taux plein (172 en 2019).
annuité : 1 année cotisée = 4 trimestres
taux de remplacement : pension moyenne rapportée au salaire moyen (pour les fonctionnaires, ce taux est égal à 75 % du salaire touché durant les 6 derniers mois avant le départ en retraite).
taux plein : dans le régime général (ne concerne pas la fonction publique), 50 % du revenu annuel moyen durant les 25 meilleures années. Il peut être perçu à condition d’avoir cotisé 43 ans.